Ou l’art d’aller dans le sens du poil de votre interlocuteur.trice
Temps de lecture : 10 minutes
Cette histoire est arrivée cet été avec mes parents, je l’avais déjà oubliée, mais pendant les fêtes de famille, elle m’est ré-arrivée toute guillerette dans les oreilles par le rire de mon père, et là je me suis dit : je tiens mon troisième article !
Nous étions partis, mon père et moi, pour visiter une cascade dans les quartiers Nord de Marseille, mais mal informés nous n’avons pas pu y accéder ce jour-ci. En revanche, nous remarquons la fabrique de savon tout à côté. Et là je me dis : pourquoi pas. Qu’après 10 ans de vie commune entre Marseille et moi, le cap est passé. Il est grand temps de regarder en face ce savon gras si célèbre.
Bref, nous entrons pour visiter et rencontrons un employé de la fabrique. Nous apprenons que les visites sont prévus par l’usine! Et aussi que le créneau de maintenant est vide ! Oui ! Mais qu’il fallait réserver ce créneau ci ! Oh nannnnn….
Ainsi commence cette discussion entre l’employé de l’usine et moi :
- Moi : « On peut visiter ? »
- L’employé de l’usine : « Oui mais il fallait réserver maintenant c’est trop tard.
- Moi : Ah d’accord, mais là vous êtes disponible ?
- L’employé de l’usine : Oui mais il fallait réserver.
- Moi : Ah très bien alors. Dites…
- L’employé de l’usine : Oui ?
- Moi : Je souhaite réserver !
- L’employé de l’usine : Ah super, et pour quand ce sera ?
- Moi : Et bien pour maintenant s’il vous plait.
- L’employé de l’usine : Ah… ! Bon et bien, combien de personne ? Attendez-moi là, le temps que je ferme, et je vous emmène.
Nous avons dû user d’une technique de négociation, pour être soi-même acheteurs!
On peut alors se demander si on marche sur la tête car finalement nous avons bien régler la visite comme prévu, et même, acheter pleins de produit à la fin de la visite ! La différence est que je n’ai pas négocié avec l’entreprise bénéficiaire de ces sommes, mais avec leur employé. Employé rémunéré peu importe le nombre de visites qu’il fait dans la journée. Donc ici, le bénéfice financier n’était pas la clé de la négociation, négociation un peu absurde il faut l’avouer…
Il s’est avéré qu’après cette journée, non seulement j’en appris beaucoup sur ce fameux savon, mais davantage sur moi-même ! D’abord parce que j’ai réussi à négocier avec beaucoup de simplicité mais également parce que j’ai réussi à faire que cette négociation se passe manière agréable pour l’autre partie (cad notre guide). Preuve en est : notre guide s’est surpassé durant la visite !
Aussi, après ce flashback durant les fêtes, je me suis dit que j’aimerai vous parler de cette méthode. Méthode que j’ai su intégrer pleinement à l’époque et méthode qui marque encore mon père !
D’abord pourquoi parler de négociation sur ce blog market ?
Parce qu’une vente est une négociation. Vous avez des bénéfices à apporter à votre interlocuteur, celui-ci à de l’argent en contrepartie, mais vous avez tous les deux des attentes : vous, une certaine somme, et lui un certain besoin à combler.
Et toute bonne négociation que ce soit pour : une vente, résoudre un conflit, un partenariat, avec un employeur, avec son employé, reprend pour moi un seul schéma efficace :
1. celui d’écouter avec gentillesse tout le long
2. de retenir les points importants
3. et d’y répondre posément et dans l’ordre de priorité que l’interlocuteur vous a donné
Le plus important dans votre discussion c’est de stopper un schéma : « moi contre toi ».
La discussion se doit de ne pas continuer dans un rapport de force, qu’il aille déjà démarré ou à venir.
- Si vous êtes dans le doute que la discussion peut tourner au vinaigre, bravo ; vous allez négocier ! Alors la première chose c’est de se préparer. Avec des petites négociations dans la vie de tous les jours d’abord.
- On vous demande de déplacer votre voiture ? C’est une négo qui commence ! Profitez-en pour mettre en pratique les 3 conseils que nous allons détailler.
- Vous voulez que vos parents vous garde un peu plus votre enfant ? Allez c’est reparti, entraînez-vous sur eux ! Au pire du pire, si ça ne marche pas, vous revenez au point 0, impossible de descendre dans les abysses du conflit avec une méthode si douce !
Voici point par point la méthode qui reprend les points de douceur et de petits cils qui clignent :
1: La posture chaton à la place de celle du tigre
Une posture en douceur ne fonctionne que si vous-même vous êtes déjà apaisé et que vous y aller avec le sourire. Alors même si ça va être un peu forcé au début, allez-y : souriez ! Surtout si face à vous ce n’est plus vos parents mais un employeur !
Donc, c’est un peu difficile à faire, mais cela consiste à ravaler complètement sa fierté, sa salive, sa cravate si vous en portez, et de se dire : c’est pas grave ! Rien n’est grave ! Donc pas la peine de s’énerver.
Vous si vous êtes ainsi, vous allez voir votre interlocuteur complètement estomaqué de votre posture bisounours. Bah oui il s’attendait à boxer avec le tigre que vous êtes, et vous voilà tout chaton.
Attention, ce n’est qu’une posture à adopter, pour recevoir des caresses et non des coups, mais au fond de vous, vous êtes prêt à sortir votre argumentaire et à pas vous laisser faire !
J’en viens à mon point n°2
2: La liste de courses
Préparer les points prioritaires pour vous, faites une liste, et mettez dans chaque sujet les 2 options plus ou moins favorables, et gardez bien en tête l’option pas du tout favorable que vous refuserez forcément.
En étant bien préparé voici ce que cela donnerait selon les situations.
Exemple 1 – Vos parents qui vont jouer les nounous :
- Vous : Si tu me les gardes lundi et jeudi c’est parfait ;
- Vous : Sinon lundi et mercredi ?
- Vous : Tu ne peux pas lundi ? Laisses tomber je vais trouver quelqu’un d’autre
Donc dans ce cas-ci 1) étant l’option de la négo parfaite pour vous, 2) un peu moins bien mais fera l’affaire, et 3) pas du tout acceptable car ça rend caduc votre besoin qui ne devient plus du tout répondu.
Et cela il faut le faire pour les discussions compliquées et dont l’issu est incertaine ! Au plus l’issu est incertaine au plus il faut que vous ayez analysé chaque sujet en amont. L’analyse du sujet doit vous faire aboutir à un arbre de sorties possibles pour vous, notamment celles qui vous sont les plus favorables.
Exemple 2 – Cas d’un conflit avec votre employeur où vous ne savez pas ce qu’il envisage pour vous :
Voici un arbre de possibilité commun à tous :
- Nouvelles missions ?
- Projet A ? Non et si je dis non je vais passer au sujet 2), 3), 4) ????
- Projet B ? Oui
- Nouveau service ?
- Non
- Non et si je dis non je vais passer au sujet 3), 4) ????
- Ah lui peut-être
- Mutation ?
- Oui si c’est dans la région ….
- Non si c’est là , là et là et si je dis non je vais passer au sujet 3), 4) ????
- Fin de contrat ?
- Oui si licenciement
- Non si demande une démission
- Oui si propose départ à la retraite anticipé…
Nous voyons ici une multitude de possibilités pour un employeur que vous sentez sur le point de prendre une décision vous concernant, et vos réponses aux premiers sujets discuté vont affectés le cours de la discussion.
Le cours de la discussion est imprévisible et donc vos émotions le seront tout autant !
Pour éviter de perdre votre calme et perdre cette posture de chaton qui le fera fondre, voici un pacte que vous passez avec vous-même qui vous permettra de garder le chaton si tout se passe bien, et de sortir un peu les griffes si le vent tourne vers une issue moins favorable pour vous !
ET quand je dis griffes, ce sont des griffes intellectuelles, heureusement : pas besoin de prendre des cours de MMA !
Voici justement le point 3.
3: L’écouteur patient aka le « burger de la mort »
Vous allez démarrer la discussion donc en étant préparé, et en ayant adopté votre meilleur profil, tout gentil, même joyeux.
Et puis vous n’allez pas commencer. Vous allez écouter votre interlocuteur et vous allez le laisser tout déballer, mais touuuuuut ce qu’il a prévu pour vous.
Et vous allez devoir jouer au Burger de la mort, vous vous souvenez ?
Vous allez écouter toutes les questions qu’il vous pose, toutes les choses qu’il a à vous dire, et vous n’allez rien répondre de suite. Vous n’allez pas le couper, jamais.
Alors bien sur vous ne restez pas silencieux sinon vous perdez toute crédibilité
Mais des : « ha » , « oh… » , « ah oui », « je vois. » « Mhmhm mm » , « Ok » ou hochement de la tête suffiront à poser le cadre voulu. Vos gestes seront celle d’une écoute active qui va créer ou recréer une confiance entre vous et la personne qui vous prend à partie.
Vous allez vraiment l’écouter. Même si c’est long, même si c’est truffé d’erreurs, de mensonges, de choses que vous ne voulez pas entendre. Il faut les entendre, car en laissant la personne parler et dire tout ce qu’elle a, vous êtes en réalité en train de gagner du terrain.
Plusieurs possibilités, dont :
- Elle vous déballe son sac en toute confiance, vous gagnez du respect ;
- Elle vous raconte ses peurs profondes, vous allez enfin pouvoir comprendre ce qui se passe ;
- Elle vous donne finalement les clés pour répondre à ses besoins, vous allez pouvoir y répondre.
Pendant l’écoute active vous préparez votre réponse point par point, ça vous laisse du « temps mental » pour reprendre votre pacte de solution et l’ordonner dans le sens des priorités de votre interlocuteur.
C’est-à-dire que concrètement vous allez mémoriser tous les points qu’iel vous donne afin d’y mémoriser vos réponses ! Et oui, ça fait du boulot mais vous verrez : l’effet est bluffant !
Enfin, quatrième et dernière étape, celle que vous attendez : la réponse.
4: La réponse
A un moment donnée votre interlocuteur.trice va se demander ce que vous pensez. Iel est d’ailleurs un peu surpris que vous n’ayez rien dit jusque-là. Et c’est iel qui va vous demander de parler et de lui répondre par une question : qu’est-ce que tu/vous en penses/ez ?
Ainsi, vous l’avez laissé s’intéresser à votre opinion. Quoi de plus beau ! Iel veut votre avis !
C’est super ! Ça devrait vous redonner le sourire si vous l’aviez perdu.
A votre tour de prendre la parole. Vous allez maintenant lui répondre ce que vous en pensez, en reprenant les sujets point par point et dans l’ordre qu’iel vous les a donné. Tout ça en le paraphrasant et en continuant d’aller dans son sens, du moins jusqu’à lui montrer un argument réfléchi et plein de bon sens.
Exemple n°3 d’une possible discussion entre moi et de futurs clients de sortie en mer au téléphone, sur un point sensible :
« Vous avez dit au tout début que vous aviez le mal de mer, et que pour cette raison vous ne monteriez jamais sur un navire. Laissez-moi vous dire que vous avez raison, c’est quasiment insupportable de vivre une telle expérience en mer, c’est pourquoi mes invités prennent leur précaution avec un petit « mercalme » et je vous assure c’est très très efficace, je pourrais vous faire lire l’article de la bloggeuse Noreli à ce sujet. Je n’ai que des bons retours même de personnes très malades habituellement ».
5: La conclusion
Méthodiquement vous ne le laissez plus parler, vous déballer tous votre plan, point par point et si vous avez bien cerné le problème et le sujet, vous avez sans doute élaboré une réponse qui ne peut plus être contredite.
Vous avez évacué animosité en étant gentil, vous avez évacué le conflit en écoutant et en le comprenant. C’est à l’autre maintenant de faire un pas s’iel veut vous rendre la pareil, et dans une relation à deux, iel se sentira obligé de le faire une fois au moins à la fin, après tous vos efforts.
Le tigre n’est pas bien loin, il est patient, il se cache au fond de vous. Au fond vous êtes la personne qui avez fait preuve de beaucoup de qualités humaine et relationnelle, vous n’êtes ni un bisounours, ni un chat. Et la personne va commencer à le comprendre à ce moment précis.
Et c’est ainsi que quand vous demanderez quelque chose de très important pour vous, la personne n’aura pas d’autre choix que d’accepter, ou sinon elle vous perdra. Car cette personne sait qu’elle ne peut pas « jouer » ou continuer ce « jeu », vous avez été transparent, à elle de l’être à son tour.
Et normalement si la personne fait partie de la moyenne sociale, elle vous répondra favorablement. Vous ne l’avez pas manipulé, elle. Vous vous êtes manipulé vous, pour donner le meilleur de vous-même. Ça personne ne pourra vous le reprocher. Si ce ne lui suffit pas, alors tant pis. Vous avez donné ce que vous pouviez. Les deux issus de cette négociations sont favorables pour vous car dans tous les cas vous êtes intègre. Et quand on a le « cul propre », et bien on ne peut rien se reprocher. Donc vous ne vous sentirez jamais mal de rien.
Le chat aussi est très propre lui aussi, mais est-ce que tout ceci a bien un rapport ? Allez je vous dis merde les chatons 😉 et dites moi si ça a marché pour vous !