« Je me retrouve le plus souvent à dire que je vends de la peau d’orange »

Ou comment découvrir que ton brevet n’est pas un produit, tout comme ta super technique n’est pas un bénéfice pour ton client !

Temps de lecture estimé : 7:00 minutes

Je vais commencer cet article par une petite devinette :

Quel est le point commun entre :


1. des boucles d’oreilles faites en peau d’orange


et


2. une bougie connectée ?

La réponse touche au point central d’une stratégie de marque dont j’aimerai aborder avec vous, et aussi le point commun à cette devinette :

Réponse : ces deux innovations ne sont pas des produits.

On ne vend pas plus : une boucle d’oreille en peau d’orange, qu’une bougie « connectée ».

Il y a une différence énorme entre l’innovation et le produit. Et cette différence n’est jamais vraiment perceptible par son inventeur.trice ou son créateur.trice, et ce qui me pousse à vous raconter cette histoire.

Dans mon histoire, il se trouve que cette différence (entre produit et innovation) n’avait pas été perçue, ni par un créateur de boucles d’oreille, ni par un inventrice d’un brevet d’allumage de flamme connectée.

Voici pour bien comprendre, un petit dialogue entre eux deux:

Un créateur de boucles d’oreille dira : « c’est magnifique j’ai trouvé le moyen de créer des bijoux avec de la peau d’orange ! ». 
L’inventrice du brevet d’allumage de flamme connectée lui répondra : « mais je m’en fiche complet, de toute façon je ne porte que de l’or. Par contre, regarde: moi, je suis capable d’allumer une bougie à distance ! ».
Le créateur lui rétorquera vexé : « Et qu’est-ce que ça peut me faire ? Je suis encore capable de me lever pour allumer ma bougie seul ! ».
L’inventrice du brevet d’allumage de flamme connectée lui répondra : « mais je m’en fiche complet, de toute façon je ne porte que de l’or. Par contre, regarde: moi, je suis capable d’allumer une bougie à distance ! ».

Et c’est ainsi que, des brevets complexes de déclenchement de gaz pour allumer des centaines de flammes en même temps dorment, et que des boucles d’oreille originales et quasiment incassables se font bouder par des acheteurs qui font la sourde oreille.

Comment faire la distinction entre les caractéristiques innovantes à dire et celles à garder pour soi ?

Ces deux histoires sont vraies, je les ai vécues récemment en décembre 2021. J’ai eu l’occasion de rencontrer leurs « concepteurs », qui modélisaient et testaient leur « mise sur le marché » respective :

  1. Le brevet dormant de bougie connectée dans le cadre d’une simulation de création d’entreprise appelé Pépite : What’s Up Doc ? . La simulation de création d’entreprise visait à former de jeunes doctorants sur des brevets dormants.
  2. Les boucles d’oreilles, dans le cadre d’une rencontre sur un stand lors d’un marché de Noël, qui invitait les passants par la phrase : « devine en quoi je suis faite ? ». En tant que passante, j’ai été, moi aussi, dans l’impossibilité de deviner que c’était de la peau d’orange ! Une fois que je l’ai su, ai-je eu envie de m’en procurer ?

La réponse est non. Non pas du simple fait de la matière utilisée, la peau d’orange, mais également car j’avais déjà mes cadeaux prêts et que, moi, je ne porte rien.

Bref je m’égare, ce que vous devez retenir c’est surtout :

L’innovation d’un produit, la manière dont vous allez l’améliorer, ou la manière qui va faire fonctionner le produit, tout ça c’est votre recette secrète. Personne ne veut la connaître.

Source : Fanny, et surement pleins d’autres !

A votre avis, auriez-vous acceptez un verre de coca-cola la première fois que vous y avez goûter si je vous l’avais tendu en vous disant : « C’est fou j’ai créé ce goût de toute part avec la formule chimique d’un mélange d’acide phosphorique ainsi que plein d’aromates secrets sous le nom de 7X?« 

Je ne pense pas.

Les caractéristiques de votre produit qui doivent apparaître sont celles qui vont créer un bénéfice réel pour votre acheteur et lui déclencher l’envie, l’envie de consommer ou d’acheter.

Les autres caractéristiques ne sont pas importantes dans l’acte de vente. Elles le seront peut-être un jour, plus tard. Cependant, dans la création d’un sentiment d’envie ou d’intérêt ce n’est pas important. Ca le sera peut-être au moment pour vous de créer votre marque.

Revenons à nos boucles d’oreilles.

Ci-dessous le pitch commercial que j’ai entendu :

  • « J’ai créé une boucle d’oreille en peau d’orange, en mettant de la résine dessus, et du vernis derrière. Les miennes n’ont pas bougé depuis 1 ans alors que je me suis baigné avec. J’ai aussi une forme unique pour chaque boucle
  • Ah tu t’es baigné cet été avec? Là ça devient intéressant lui dis-je. Donc elles vont dans l’eau ?
  • Oui, apparemment »

Donc notre créateur sans le vouloir a dans son stand des boucles d’oreilles incassables, waterproof, et faite dans une matière qui ne va rien lui coûter !

me dit-on dans l’oreillette

Là, nous commençons à avoir un début de produit.

Si je devais la vendre aujourd’hui, je ne mettrais pas une orange en guise de décoration comme ce fût le cas mais des décors de plages de l’Océan Indien, et je dirais :

« Voici un bijou qui vous accompagnera toute votre vie ou toute la vie de la personne à qui vous l’offrirez. D’une matière écologique, résistante à l’eau et incassable, d’un design unique rappelant l’Afrique de l’Est, vous aurez le look pour allez prendre au moins un mois de vacances ! Voulez-vous vous voir en vacances ?»

L’histoire de cette peau d’orange n’interviendra que plus tard dans la discussion, à un moment ou les boucles sont déjà sur des oreilles convaincues :

  • « C’est vrai qu’elles sont très belles, c’est un plus qu’elles soient aussi résistantes ! Au fait, vous dîtes que c’est un matériau écologique ?
  • Ah c’est fou ! Je n’aurais jamais pensé, quelles plantes exactement ?
  • Je me sers d’agrumes et de fruits principalement !
  • Comme c’est original ! »

Et voici comment la peau n’est plus un argument commercial, n’est plus un bénéfice client mais simplement un petit secret qui se partagera ou non !

La personne ici achète un design spécifique d’un bijou qui lui rappelle le voyage et la dépayse. Elle sera fière de dire qu’elle participe à l’écologique en n’achetant rien qui serait extrait dans des mines africaines, tout en vivant un peu de cette culture qui lui rappelle de bons souvenirs.

De plus, l’expression « peau d’orange » rappelle quand même tout autre chose ! Je la bannirais complètement du discours commercial…

La bougie connectée maintenant !

Je pense que vous commencez à comprend ou je veux en venir maintenant.

Le brevet est l’invention d’une flamme qui s’allume « seule ». Bon très bien, mais est-ce vraiment important pour vous et moi ? Quels bénéfices peut-on en tirer ? En gribouillant sur un coin de table et en réfléchissant 5 minutes on peut en tirer au moins les points suivants :

  1. On peut allumer sa bougie quand on est loin ;
  2. On peut allumer plus qu’une bougie en même temps ;
  3. On a une flamme réelle au lieu d’une ampoule led.

Quel bénéfice ça a ?

  • Un gain de temps considérable d’allumage dans les concerts à la bougie ;
  • Un effet d’authenticité incroyable au feu de Daenerys dans Game of Thrones ;
  • On peut cramer sa maison sans même y être ! Super si on déteste vraiment celui qui ne nous a pas donné le permis de conduire pour la 5ème fois !

Si on met de côté le troisième bénéfice, on a déjà un plan de création de marque pour deux secteurs : a) le divertissement, la télé, et le cinéma et b) l’évènementiel, les concerts, les spectacles !

Et si Johnny avait été encore de ce monde, il n’aurait pas eu à dire « Allumez le feu ! » il aurait juste cliqué « On » sur son application « Johnny’s on fire »

Ainsi, l’inventrice, au lieu de dire :

  • « Je vous vends une bougie connectée qui vous permet avec téléphone d’allumer votre bougie pendant votre moment détente » (ce qui aurait hérissé le poil de pas mal de nos copines adeptes de moment yoga et de pause téléphone)

Elle aurait pu ainsi se faire mousser et dire ceci  :

  • « J’ai trouvé une solution pyrotechnique pour vos effets lumières à la bougie dans votre prochain tournage, il suffira juste d’une application et vous aurez 1000 flammes réelles que vous contrôlerez. Ainsi l’Homme et la Femme ont découvert le feu, et 50 000 ans plus tard vous pourrez dire : Je le contrôle. »

Encore d’autres exemples tirés du réel ?

Toutes mes expériences de vie professionnelles en tant que business développer se sont résumées à trouver et quasiment « extirper » à mes collègues, employeurs et donneurs d’ordres leurs bénéfices de leurs innovations.

Fanny en défricheuse
  • A Jérôme et Laëtitia qui créa un panneau solaire photovoltaïque et thermique il fallut trouver en quoi ce fût avantageux pour le propriétaire de toitures, et ne surtout pas se targuer d’avoir réussi à faire les deux. Seuls les geeks du métier vont avoir envie de le savoir….
  • A Benoît et Alessandra qui créèrent un lieu de coworking, qu’il fallu remplir et dont le bénéfice-clients s’est trouvé être ; non pas dans les murs car le lieu n’était ni sur le vieux port, ni chic, mais ; dans sa communauté de client qui créèrent une ambiance qui me revient encore aux oreilles aujourd’hui !
  • A moi, Agathe et Joël, qui inventèrent un système de carte à gratter pour que les cafés puissent se payer sans se consommer tout de suite et donc puisse être donné à un inconnu ; mais qui n’arrivèrent pas à convaincre les cafés que le bénéfice de cette action allaient leur rapporter de la communication. (Nous n’avions pas beaucoup de force de communication à l’époque…)
  • A mon ex boss, qui voulait vendre du service internet de récolte de fonds par l’intermédiaire du conseil de marque, de la formation au marketing et de la communication. Il savait que toutes les pages internet se valent et que seuls les « bons en communication récoltent vraiment des fonds ».  Alors que moi je me retrouvais à ne rien avoir à vendre mais avec plein de conseils à donner. Lui, il savait que son produit n’était pas plus performant qu’un de ses concurrents.
  • A moi et mon pointu nommé Coco qui vend un moment intime en mer, hors du temps. Et non une location de bateau avec skipper.
  • A ma collègue navigatrice et très talentueuse qui vend une culture maritime grâce à ses dessins, ses sacs, ses voiles et ses protections de bateaux et non simplement « des sacs en voiles de bateaux » ( ce qui n’a rien « de nouveau » de nos jours).

Ainsi avec mes mots j’ai réussi à vous parler de « business modèles », de propositions et de valeurs.

Value Proposition Design par strategyzer.com/vpd

La « value proposition » c’est ce que vous devez mettre au centre de votre modèle économique. C’est ce qui va faire que réellement vous allez faire mouche auprès de vos futurs clients.

Value Proposition Design par strategyzer.com/vpd

Les spécificités techniques elles se retrouvent dans la case « Outils » du business model canvas et elles vous permettent de perfectionner votre produit. Certains sont aussi un argument de vente comme des boucles « waterproof » et d’autres sont justes un truc à vous.

Value Proposition Design par strategyzer.com/vpd

La proposition de valeur motive vos clients, mais vous motive surtout vous ! C’est aussi la raison pour laquelle vous voulez adressez à un marché ! C’est un besoin non répondu qui vous targue de le faire !

Value Proposition Design par strategyzer.com/vpd

Pour en lire plus je vous invite à lire ce super preview gratuit de Value Proposition Design par strategyzer.com/vpd :

Et si vraiment l’anglais est votre fort je vous conseille le livre original de 2010 qui contient toutes les explications d’un business modèle :

Et maintenant je n’ai plus qu’a vous souhaitez une bonne proposition de valeur!

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